M. Et meuf et DJ, c’est plus simple aujourd’hui ?
C. G. Ça va mieux. Mais en 2017, quand j’ai commencé à mixer, c’était vraiment hard. Les filles DJ à l’époque, tu pouvais les compter sur les doigts d’une main. D’un côté, je recevais énormément d’amour, notamment de la part des filles qui me disaient : “Enfin une meuf qui mixe ! Enfin de la représentation !” Mais côté mecs, que ce soit des DJ ou des organisateurs de soirées, c’était moins cool. J’ai pris énormément de remarques sexistes. Du style : “C’est une meuf, évidemment qu’elle sait pas mixer !” ou “Elle est juste bookée parce qu’elle est jolie !” En soirée, sur les réseaux sociaux, j’en prenais plein la tête. Tellement que j’ai failli tout arrêter. Et puis je me suis dit : “C’est simple, les endroits trop négatifs, je n’y fous plus les pieds”. Et avec le temps, ça s’est calmé. Aujourd’hui, il y a plein de filles qui mixent. C’est plus chill.
M. On peut parler de sororité entre les filles DJ ?
C. G. Pas assez selon moi. Personnellement, si je vois d’autres filles sur le line-up, je suis trop contente ! Je vais aller leur parler, leur demander depuis combien de temps elles mixent… Je serai toujours plus bienveillante avec elles qu’avec les mecs !
M. Bosser la nuit, c’est forcément être du côté de la fête, du fun… Mais c’est aussi une vie décalée, frénétique. Il est encore trop tôt pour avoir une vraie discussion sur la santé mentale des DJ ?
C. G. Tu as raison, on devrait avoir ce débat. La nuit, tu n’as ni le droit, ni le temps d’aller mal. Tu sors, tu fais la fête, tu bois, tu traînes avec des gens qui ne sont pas vraiment tes ami·e·s, juste des connaissances de soirée… Quand tu y réfléchis, il n’y a rien qui va ! Et si tu ne t’astreins pas à une certaine éthique, tu peux vite vriller et devenir une âme perdue parmi d’autres âmes perdues. Tu l’auras compris, je ne suis vraiment pas une meuf du matin mais je me force à me lever pour me raccrocher à la vie. Et maintenant, j’essaie d’appréhender le DJing comme un taf. Quand je mixe, je ne bois plus. Après mon set, je traîne maximum une heure en soirée puis je rentre. Sinon, c’est dangereux car tout est à portée de main.
M. Tu fais partie d’un collectif d’artistes. Ça change quoi ?
C. G. C’est une force inimaginable. Mon collectif s’appelle Sixtion. Avant qu’on le fonde, on était ami·e·s et ça change tout de faire les choses avec des gens que tu apprécies vraiment. Quand j’avais 18 ans, j’ai avancé avec un autre manager. Je n’avais aucune confiance en cette personne. Et au final, mon intuition était juste parce qu’il était un peu chelou. Parfois, on peut avoir la tentation de vouloir se faire un nom toute seule. C’était mon cas quand j’ai commencé, mais c’est une erreur !