Une fois de plus Paris a clos le fashion month en beauté et ce qui ressort de cette semaine (9 jours en réalité, c’est long) c’est certes un foisonnement de marques, de collections, de défilés, de soirées et de présentations (on était à ça de la nausée) mais c’est aussi et surtout un silence assourdissant de la part de l’industrie sur les enjeux sociétaux, politiques et écologiques du moment. Alors qu’en 2020 toute la mode scandait “Black Lives Matter” et qu’il y a deux ans à peine, elle s’indignait aussi de la guerre en Ukraine et du sort réservé à ses ressortissant·e·s (au point de parfois annuler des défilés), pas à un mot cette saison sur la situation à Gaza et pas non plus l’ombre d’une déclaration pour demander un cessez-le-feu. Un silence Ô combien dérangeant alors que le cinéma français s’est récemment positionné sur le sujet lors de la dernière cérémonie des César qui avait lieu trois jours seulement avant le début de la Fashion Week Parisienne. Un fait de plus qui vient nous confirmer que la mode vit bien dans sa propre petite bulle capitaliste et que, plutôt que de parler de justice et de libération, elle préfère tout simplement vendre des vêtements. Malgré tout, ce manque de considération sociale n’a “heureusement” pas empêché à la créativité de s’exprimer. Et ça tombe bien parce que sinon on n’aurait pas grand chose à raconter de ce cirque vestimentaire. Entre les 10 ans de Nicolas Ghesquière chez Louis Vuitton, les premières fois des nouveaux designers chez Chloé, Lacoste et Alexander McQueen, le retour gagnant d’Ester Manas au calendrier ou encore les shows spectacles de Mugler, Courrèges et Casablanca, retour sur une semaine riche en émotions, certes, mais pas en déclarations. Récap en 11 points.
1. Le règne des mastodontes
Les 10 ans de Nicolas Ghesquière chez Louis Vuitton
Saison toute particulière pour Louis Vuitton puisque ce défilé FW24 marquait les 10 ans de Nicolas Ghesquière en tant que directeur artistique des collections femme de la maison française. L’occasion pour lui de faire un rappel de ses œuvres passées comme une exploration introspective. On a ainsi pu voir des blousons bombardiers, des robes de style japonais, des pantalons avec des coupes en biais, des gants de fourrure ou encore des robes imprimées avec l’iconographie des bagages LV. Bref, du Ghesquière tout craché.
Miu Miu entre l’enfance et l’âge adulte
Outre les “runway debut” de l’artiste britannique Little Simz et du danseur étoile Guillaume Diop, la collection FW24 de Miu Miu cherchait à explorer “la durée et l’étendue de la vie des gens”, en examinant les contrastes entre l’enfance et l’âge adulte, et la manière dont chacun·e s’exprime à travers l’habillement. Résultat, on a vu des manteaux, des broches, des gants surdimensionnés, des combinaisons et des jupes bouffantes, le tout dans une palette de couleurs vives et de styles juxtaposés.
La miss de Dior
1967, “Je t’aime moi non plus…” en bande son, les années Marc Bohan (ancien directeur artistique de la maison décédé en 2023), les robes trapèzes, les tailles cintrées mais pas trop, les trenchs, les carreaux, le léopard et le graff “Miss Dior” (il s’agit d’un agrandissement du logo d’une pub de l’époque)… C’est de toute cette era des sixties et des prémisses de la libération du corps des femmes (fini les corsets et le tailleur Bar) qui ont inspiré Maria Grazia Chiuri pour cette nouvelle collection très “lady like”.
Le tea time de Loewe
C’est toujours comme ça avec Jonathan Anderson chez Loewe : à première vue, son travail repose sur le fun avec des coupes hors normes et des accessoires chelous (le sac asperges c’est le nouveau sac pigeon) puis, lorsqu’on y regarde de plus près, le créateur pousse l’audace un cran plus haut en questionnant la société et nos comportements. “J’ai commencé à explorer l’idée de la provenance des objets, de la raison pour laquelle nous achetons des choses pourquoi elles ont une signification”. La collection dont de nombreuses pièces évoquent l’intérieur d’une vieille dame à l’heure du tea time mise aussi sur l’oversize et les imprimés radis ou tapisseries.
“Un homme et une femme” selon Chanel
Lors de son défilé FW24, Virginie Viard a rendu hommage au classique du cinéma français « Un homme et une femme » de Claude Lelouche avec un court métrage mettant en vedette Brad Pitt et Penélope Cruz. Côté vêtement, ça donne une allure décontractée avec de fins manteaux en tweed ceinturés dans des tons sunset et des pulls douillets, des ensembles assortis avec des boutons en perles ou encore des cardigans à col marin représentant le ciel bleu-gris et les longues plages de la côte normande.