Texte :  Antoine Leclerc-Mougne 

Nous en sommes au début de l’année 2022 et avec elle la première semaine de la couture printemps-été qui, en cette période de pandémie interminable (sortez-nous de là !), aura malgré tout réussi à marquer les esprits. Entre exagération et fantaisie d’un côté, et classiques et fondamentaux de l’autre, retour en 6 points marquants sur la Couture SS22.  

Après quelques saisons en demi-teinte bouleversées par la pandémie de covid-19, la semaine de la couture parisienne a fait son grand retour avec des défilés physiques pour toutes les marques majeures du calendrier. La principale tendance à ressortir de cette courte et dense semaine semble une volonté pour les maisons d’opérer un retour à la pureté et à la simplicité, notamment avec l’apparition ici et là de la robe colonne blanche minimaliste sur les podiums. Mais la saison a aussi été marquée par le retour de la fantaisie et de l’exagération avec les grands classiques applicables qui commençaient à nous manquer terriblement : silhouettes drama queen, traînes, grands drapés, embellissement et ornementations dorés, joaillerie opulente, couvre-chefs démesurés… Bref, de la couture spectacle comme on l’aime.

1. Le statement body positive de Valentino

Depuis qu’il est à la tête de Valentino, Pierpaolo Piccioli place la barre toujours un peu plus haut à chaque collection. Mais cette saison, en plus de taper dans le mille, il a marqué les esprits en choisissant de faire défiler un casting éclectique célébrant toutes les formes de corps, tous les âges et tous les genres. Comme un ode à la diversité, sa collection s’est affranchie des codes classiques et des canons de beauté un peu poussiéreux de la couture pour en proposer une version plus contemporaine et universelle, mais aussi plus en phase avec son époque. Les mannequins Kristen McMenamy, Marie Sophie Wilson, Lara Stone, Violetta Sanchez, Lynn Koster et Jon Kortajarena qui faisaient partie de cette incroyable distribution, nous montraient clairement, en déambulant sur le podium, que la couture peut se construire autour de n’importe quelle silhouette. En véritable architecte des formes et des proportions, Pierpaolo Piccioli s’est positionné comme le maître incontesté des coupes impeccables.

2. La flamboyance de JPG par Glenn Martens

Après Sacai, c’est Glenn Martens, créateur de Y/Project, qui a pris cette saison les rênes de la couture chez le maître Jean Paul Gaultier. Résultat, le créateur belge a concentré son attention sur les éléments phares et les plus emblématiques de la maison comme le corset, le laçage, le tulle aérien, les mailles tressées et le drapé. Au total, ce sont 36 silhouettes corsetées plus démentes les unes que les autres (robes de bal, jupes-pantalons en jean…) qui ont défilé et nous ont offert un sens du drama stylistique qu’on avait pas vu depuis longtemps. C’est aussi à travers les imprimés que Glenn Martens a joué avec les illusions d’optiques et la nudité naissante, notamment en retravaillant et en déconstruisant les rayures de la classique marinière.

3. La fantaisie assumée de Schiaparelli

Pour sa collection haute couture printemps-été 2022, la marque Schiaparelli a livré une interprétation sans concession de ce qu’elle considère être la couture. C’est-à-dire quelque chose d’aussi fun que de flamboyant. Dévoilée au Petit Palais, la collection donnait la sensation de voir marcher sur le podium des créatures divines et déesses mystiques jouant avec les astres et les éléments. Dans une palette chromatique très restreinte (noir, blanc et or), les looks arboraient des détails à la fois subtils et surréels comme les accessoires inspirées de l’anatomie (respect pour la capeline cerveau) tout comme de l’astrologie (big up pour les créoles Saturne). Le tout sans oublier la pointe de fun qui caractérisent la création Daniel Roseberry comme le sac baguette de pain, les bustiers métalliques ou les larmes pailletées en ce qui concerne le maquillage. Oui, la couture peut encore nous transporter et nous faire rêver.

4. Les classiques revisités de Chanel

Première pour Chanel, faire défiler sa collection couture pour la première fois dans le Grand Palais éphémère du Champ de Mars. Mais ce n’est pas pour autant que la maison française a perdu de sa superbe. Elle a vu grand. D’abord en démarrant son show avec Charlotte Casiraghi à cheval et au galop puis en enchaînant avec 45 looks qui chacun ont permis de revisiter les classiques de la maison dans une version plus jeune et plus fraîche : la veste en tweed rebrodée de sequins, les robes aériennes sculpturales, les jeux de transparence, les tailleurs… Le tout agrémenté d’un un décor graphique imaginé par le Xavier Veilhan et d’une performance de Sébastien Tellier.

5. La culture et l’artisanat selon Christian Dior

Une fois de plus Maria Grazia Chiuri a su habilement mêler art et mode grâce à l’exposition au sein du set de son défilé des toiles colorées et mystiques des artistes indiens Madhvi et Manu Parekh, qui ont conçu de sublimes tapisseries brodées à la main de Chanakya – l’école d’artisanat indienne qui forme les femmes à ses arts et métiers. Il se dit que 380 artisans ont travaillé 280 000 heures sur l’installation de ces 340 mètres carrés de toiles. Outre le décor, la maison s’est focalisée sur ce qu’elle sait faire de mieux : son artisanat. Et ce grâce à des broderies spectaculaires ou encore grâce à des embellissements sur les collants, le tout dans une pallette de couleur sobre et minialiste oscillant entre le gris, le blanc, le noir et le beige.

6. Le premier défilé couture physique de Kim Jones pour Fendi

Depuis qu’il est à la tête des collections femme de Fendi, Kim Jones n’avait pas jamais eu l’occasion d’organiser un défilé physique à proprement parler (merci Miss Rona). C’est désormais chose faîte puisque le créateur a fait défiler sa collection à la Bourse de Paris. Mais c’est une autre ville qui l’a inspiré puisqu’il a choisi d’explorer à nouveau les codes de la ville de Rome au travers de broderies et bordures à sequins qui s’associaient aisément en contraste avec l’allure et l’esprit monastiques des robes monochromes. Un sans faute de l’élégance à l’italienne.