M. C’est aussi un album de rupture…
C.M. C’est vrai… Je venais de quitter mon premier amour lorsque j’ai commencé à travailler sur ce disque. La première chanson que j’ai écrite, c’est “Spooky Island”. J’ai samplé ma voix et j’ai écrit par dessus dans un état de tristesse incontrôlé. Je ne comprenais pas ce qu’il m’arrivait. Personne ne m’avait prévenue que c’est comme ça que ça se passait, une rupture. Ou peut-être qu’on m’a prévenu mais j’ai pas écouté (rires). J’avais 20 piges mais je pensais que c’était la personne de ma vie… Du coup, j’ai vraiment écrit comme une adolescente qui rentre dans l’âge adulte. Je ressentais tout très fort: le chagrin, l’amour, la haine…
M. T’as 22 ans mais t’es dans l’oeil du public depuis déjà 10 ans. Quel souvenir gardes-tu de ton passé d’influenceuse ?
C.M. Le Gucci gang, c’était tellement naturel, tellement vrai qu’au final jamais je ne pourrai y voir du mal. À part le fait qu’on s’est sans doute faites un peu manipuler par les marques. On étaient des petites meufs de quinze-seize ans, on aurait pu se faire grave utiliser sans s’en rendre compte. Mais ça, tu t’en rends compte seulement plus tard. À l’époque, les influenceurs, ça n’existait pas ! Parfois, je me dis que j’ai un peu contribué à créer un monstre. Je ne dis pas que c’est une mauvaise chose d’être influenceur. J’ai des potes qui font ça, qui sont de vrais créateurs de contenu et je respecte. Mais aujourd’hui il y’a trop de gens qui se croient cool. On a créé une génération qui consomme les choses différemment, consomme la musique différemment… Et coté réseaux sociaux, je me sens totalement larguée ! Je ne sais pas gérer les likes, les views… En tant que musicienne et je vois à quel point ça a changé la relation à la musique. Je vois des gens qui font cinquante reels avec le même bout de chanson en espérant en faire un banger ! J’essaie de garder un distance avec ça. Moi, je regrette l’époque des vraies stars. Prince n’aurait jamais déballé sa vie comme ça.
M. C’est chaud de vouloir garder une mystère à l’heure BeReal et de Tik Tok…
C.M. Grave ! Je partage quelques tranches de vie mais je ne veux pas me surexposer. Je garde mon copain pour moi, ma famille pour moi… Je choisis ce que j’ai envie de donner ou de ne pas donner. Je donne déjà beaucoup sur scène, pourquoi je devrais donner encore plus sur le digital ? Parfois mon label me pousse à en faire plus. “On a besoin de Tik Tok, on a besoin de ci, de ça…” Ils se disent que je dois maitriser ça mieux que tout le monde mais le Gucci Gang c’était absolument pas réfléchi. La dernière fois je regardais de vieux posts et je me suis dit “mais en fait, je ne publiais quasiment rien !” Nos photos n’étaient même pas belles mais elles étaient spontanées. Il n’y avait pas encore ce besoin de présenter un instagram parfait…