Mixte. Depuis plusieurs semaines, tu accompagnes “Diamant brut” lors de rencontres en France et à l’étranger. Comment vis-tu ces premiers retours du public ?
Agathe Riedinger. Je n’imaginais pas que ce serait aussi fort. Ça peut paraître étrange, mais ces rencontres me font réaliser que j’ai fait un film et que ce que j’ai eu envie d’exprimer est compris par des publics très différents. C’est hyper émouvant. Au niveau des retours, même si c’est un film que je voulais radical et enragé dans sa mise en scène, je réalise qu’il est beaucoup plus violent que je ne le pensais : certains spectateur·rice·s se rendent compte que se faire belle, ce n’est pas juste se mettre de la poudre sur les joues. Je suis satisfaite de constater qu’on ouvre un peu les yeux – même si mon film est encore bien loin de la stricte vérité.
M. La télé-réalité est rarement regardée par le cinéma, encore moins souvent avec bienveillance. Quel est ton rapport à ce sujet ?
A.R. La télé-réalité, c’est un peu ma nourriture quotidienne. J’ai beaucoup regardé Les Anges, Les Marseillais et toutes leurs émissions satellites. Depuis qu’ils existent, je suis avalée par ces programmes. J’en regarde beaucoup, je suis les candidat·e·s sur leurs réseaux et comme ils sont repris d’émissions en émissions, j’ai le sentiment d’avoir grandi avec eux·elles.
M. Qu’est-ce qui t’a intéressée au point d’en faire le sujet d’un court (“J’attends Jupiter”) et de ton premier long-métrage ?
A.R. La première raison, c’est que j’ai été sidérée par la violence des programmes et de ce qu’on y balance au nom du divertissement : culture du viol, harcèlement, misogynie, racisme, mépris de classe. Je ne comprenais pas que ces émissions soient vendues à des audiences aussi jeunes – des ados, voire des enfants – et se retrouvent ensuite sur les réseaux sociaux, sans modération possible. Je ne comprenais pas que personne n’en parle ni que l’on me regarde d’aussi haut quand je disais en regarder. L’autre raison, c’est que j’ai une vraie fascination pour les candidates, des jeunes femmes avec des corps surféminisés, aux prises avec ce culte de soi et de la perfection. Dans la mesure où ces femmes se font taper dessus en permanence, il y a quelque chose que je trouve très courageux dans leur manière de se présenter. Derrière leur apparence sursexualisée, je vois un énorme cri d’amour.