Mixte. Pour ton premier long métrage, tu te retrouves à l’affiche avec Isabelle Adjani. Tu le vis comment ?
Khalil Ben Gharbia. Je dois te faire un aveu : je n’avais pas vu un seul de ses films. Je connaissais… son nom. On m’en avait beaucoup parlé mais je n’arrivais pas vraiment à mettre un visage dessus. Je me rappelle que j’avais commencé à regarder La Reine Margot mais je m’étais endormi devant. J’ai vu la première scène et blackout… (rires gênés)
M. Pardon mais tu dois être le seul comédien en France à ne pas connaitre Isabelle Adjani !
KBG. Peut-être mais en tout cas ça m’a permis d’aborder le tournage très sereinement. La première fois que j’ai rencontrée Isabelle, je ne savais pas que c’était elle. Je me suis mis à la tutoyer direct. « Hé salut, tu vas bien ? » Et là, dans les regards autour d’elle, j’ai compris qu’il se passait un truc (rires). Denis, c’est différent, je connaissais son travail. Il y a un tel amour, une telle générosité qui se dégage de lui. Je n’ai jamais vraiment eu de formation de théâtre. Je n’ai jamais réussi à trouver l’endroit de non-jugement où j’aurais pu me sentir à l’aise. Denis est mon mentor, mon parrain dans ce métier. Et même au-delà. Car quand on apprend à jouer, on apprend à vivre.
M. Dans le film, tu joues un objet de désir. Il y a des scènes de nudités, pas forcément la chose la plus facile à jouer. Tu appréhendais ?
KGB. François ne m’en a pas parlé tout de suite. Puis lors de la première lecture, j’ai compris entre les lignes qu’il y aurait un peu de nudité. François m’a rassuré. Il a insisté sur le fait que ça serait plus suggéré que frontal. Surtout, il m’a toujours laissé le choix. « Si ça te dérange, ne t’en fais pas. On trouvera une autre façon de tourner la scène. » m’a t-il dit. Mais je trouvais ça important car ça servait le film. Je sentais qu’Amir avait besoin de se livrer. C’est un pacte. Une fois que le personnage de Peter reçoit ce don, il n’a plus d’autre choix que de donner en retour. Je me suis senti très à l’aise sur le tournage. Denis était tellement protecteur avec moi, tellement à l’écoute de mes doutes. Dès qu’il sentait que je réfléchissais un peu trop, il venait me parler.
M. Le film explore les rapports de séduction et de pouvoir entre cinéastes et comédiens. Si le film se passe dans les années 70, il parle beaucoup du cinéma d’aujourd’hui, non ?
KBG. Absolument. C’est une question qui s’est imposée à moi dès mes premiers castings. Souvent, les équipes instauraient un rapport de force malsain. Puis un jour, je me suis dit : ça doit marcher dans les deux sens. Je suis devenu attentif à ceux que les réalisateurs avaient à me proposer. Comment ils allaient me diriger. Quel rôle ont-ils à m’offrir ? D’un coup, tout ça fonctionnait mieux. Je n’étais plus dans le besoin de plaire. Et au final, c’est ce qu’on attend de toi : défendre quelque chose de viscéral, de personnel. Dans ce milieu-là, c’est quand on veut le moins plaire qu’on plait plus. Ça marche comme ça aussi dans ma vie amoureuse. C’est souvent quand on n’essaie pas de me séduire qu’on me charme.