Sagaboi SS24

Le fashion month pour le menswear printemps-été 2024 vient de démarrer et comme à son habitude, c’est Londres qui a ouvert le bal. Retour sur 5 défilés aussi créatifs que sociologiques et politiques, et qui ont marqué avec justesse la semaine masculine londonienne.

1. La confirmation de Martine Rose

La saison dernière, en janvier 2023, Martine Rose avait marqué l’industrie de la mode en participant au salon de mode masculine de Florence en Italie, plus connu sous le nom Pitti Uomo. Cette saison il est revenu à la maison en faisant défiler sa collection dans un centre communautaire/club social du nord de Londres. Au programme du décor : sous-bocks de marque, pintes de Stella Artois et sachets de chips Tayto. L’envie de Martine Rose ? Retrouver l’intimité et la communauté que ces espaces récueillent traditionnellement à travers la Grande-Bretagne (des discothèques aux rassemblements sous-culturels). Côté collection, on a droit à une approche décalée et subversive de la couture traditionnelle et du streetwear, entre étrangeté et sensualité : costumes surdimensionnés confectionnés en tissu éponge, slips diaphanes et vêtements techniques avec décolletés fabriqués pour hommes et femmes ou vêtements de travail haute visibilité semblant éraflés par l’usage… Un sans faute.

2. Le chic structuré de Daniel W. Fletcher

Pour son défilé SS24, Daniel W Fletcher s’est associé à Huntsman Savile Row – tailleur sur mesure iconique de cette fameuse rue historique de Londres qui a d’ailleurs inspiré le décor des films Kingsman. Résultat, sa collection a été pensée comm une ode à la riche histoire de l’artisanat et de la fabrication britannique (“précision, intégrité, nuance”, décrivait les notes de cette collection qui a été présentée dans les salons ornementaux de RA Burlington House et qui se compose de pantalons en laine légers et diaphanes, de chemises habillées surdimensionnées et de chemisiers à col noué. Le tout comprenant 9 costumes sur mesure – qui seront disponibles chez Huntsman Savile Row – et 12 silhouettes de prêt-à-porter inspirées des archives du tailleur, y compris un motif cousu qui rappelle les points de bâti utilisés dans la création d’un costume. Une référence qui n’est pas sans rappeler des techniques similaires utilisées et popularisées par Maison Margiela. Les vrai·e·s savent.

3. Le statement androgyne d’Av Vattev

“Sweet Summer Sweat” (“Douce sueur d’Été” pour les LV1 espagnol), c’est le nom évocateur donné par Antonio Vattev à sa nouvelle collection SS24 pour sa marque Av Vattev. La vérité derrière ce nom c’est que le créateur bulgare s’est inspiré du style unique du leader des Rolling Stones, Mick Jagger, dans les anénes 60. Et plus particulièrement d’une robe blanche qu’a portée le musicien pour se produire sur scène en 1969 — une robe qui continue d’avoir une influence sur le “look androgyne d’aujourd’hui” selon le designer — ainsi que du tartan à carreaux que Jagger arborait dans les rues de Londres fin desannées 1960/début des années 1970. Une fois bien appréhendées et mises en places, ces références ont été fusionnées avec l’oeil du créateur connu pour ses silhouettes nettes et graphiques. Résultat, on a eu droit à des hauts déformés à fermeture à bascule ou à lacets, des chemises à col en pointe avec une légère basque à l’ourlet, des mini-jupes à paillettes scintillantes, des jeans effilochés et des mini-shorts étriqués. Werk.

4. Le cool politique de Sagaboi

Une fashion week sans défilé ayant un statement politique, ce n’est pas une fashion week digne de ce nom. Voilà pourquoi pour la collection SS24 de Sagaboi, son créateur Geoff Cooper s’est inspiré des problématiques migratoires et des réponses imaginées et réelles qui sont données aux cultures introduites dans de nouveaux espaces. Intitulée “Fresh Off The Boat”, (comprenez “tout juste débarqué”, terme parfois voire souvent péjoratif pour les immigrant·e·s arrivé·e·s d’un pays étranger), la collection prend l’expression à contre pied et délivre des silhouettes pour le coup vraiment fraîches à travers des jeux de couleurs, de textures et d’imprimés. Son but est simple : offrir à celles et ceux “fraîchement débarqué·e·s” un style frais afin qu’il·elle·s puissent marcher avec confiance et fierté. Et avec la tête haute, pour que leur entrée dans ces nouveaux espaces souvent hostiles ne soit pas régie par la peur, mais par une certaine idée de l’optimiste. C’est ça qu’on veut.

5. Le plouf sexy de Saul Nash

Ancien lauréat du prix international Woolmark, Saul Nash a clôturé la fashion week londonienne en beauté avec une collection très summer puisque toutes les silhouettes étaient pensées pour la plage, avec des références aux racines guyanaises de sa mère et à l’héritage anglais et mauricien de son père. Intitulée « Intersection », la collection a vu des mannequins s’allonger et se détendre sur le sable avant de descendre le catwalk de façon nonchalante, histoire de refléter l’atmosphère et le mode de vie calme de Maurice. Tout était chill, avec des maillots de bain, des combinaisons de plongée, des hauts en tricot et speedos assortis, des bas en nylon souples ou encore des sandales tissées, portées par des BG qui correspondaient parfaitement au fantasme et au cliché du summer boy avec qui on irait bien faire un petit quickie derrière les dunes.