3. Trouver sa (queer) house
“Au Manko, je me suis dit : ‘Ça y est, j’ai trouvé mon endroit’. On m’a encouragée à être qui j’étais vraiment et on m’a donné les clés pour être la meilleure version de moi-même. J’étais entourée de gens incroyables : des drag-queens, des acrobates… C’est une femme trans, Allanah Starr, qui m’a appris à me maquiller, à mettre une perruque, mon costume, etc. J’avais 21 ans, ce qui est très jeune pour baigner dans un univers si libéré et sexualisé, mais c’est ce qui m’a permis de découvrir qui j’étais et d’apprendre l’art de performer. On m’a confié des personnages de femmes badass à incarner, comme Guesch Patti ou Barbara. Mon numéro préféré, c’était ‘Cannibal’. Il débutait sur le titre de Grace Jones qui dit : ‘I’m a man-eating machine’. J’étais en imper, assise sur une chaise en train de fumer une clope et ensuite boum, je jetais la clope et ça partait en strip sur ‘OPR’ de Gesaffelstein avec des lasers qui traversaient la salle du cabaret ! Je sentais le sol vibrer, tellement les gens tapaient des pieds. Il m’est arrivé, même là-bas, de subir des regards ou des gestes déplacés pendant que je performais. Un soir, un homme, bourré, m’a mis une claque hyper violente sur les fesses alors que je traversais la salle. J’étais en collant résille, t’imagines la douleur ! Je l’ai immédiatement signalé à la sécurité qui l’a dégagé. J’étais chez moi là-bas, c’était hors de question que je subisse des agressions sexuelles dans ma maison. Parce que tu es dénudée, les mecs s’octroient des droits, une permissivité. J’ai toujours dénoncé cela sans pour autant cesser de montrer mon corps ; car arrêter, ce serait leur donner raison.”
4. Collaborer avec les meilleur.e.s
“Au Manko, j’ai été repérée par Jean Paul Gaultier qui m’a castée pour le Fashion Freak Show (spectacle-revue retraçant l’histoire de la maison JPG joué entre 2018 et 2020 aux Folies Bergères à Paris puis à Moscou, ndlr). C’était une expérience très challengeante, car j’étais ‘swing’, ce qui signifie que je devais connaître tous les rôles des danseurs de la troupe car, à tout moment, je pouvais avoir à remplacer quelqu’un de différent. Parfois, il fallait que je joue des rôles de mecs, ce qui était super car c’est ce que je recherche aussi, incarner d’autres personnages sur scène que la fille badass et sexy. Cette expérience m’a donné accès à la marque JPG, avec laquelle je collabore toujours, et une visibilité pour plein de projets par la suite. Par exemple, en décembre dernier, j’ai accompagné l’artiste Fishbach pour son clip ‘Masque d’Or’. Je l’ai coachée pendant trois semaines pour travailler le côté ‘femme fatale’ qu’elle voulait faire ressortir et j’ai créé la chorégraphie. C’était super de suivre une femme qui n’est pas danseuse à la base et qui a travaillé d’arrache-pied pour incarner un personnage qu’elle voulait devenir. Avant cela, j’avais aussi réalisé, en tandem avec un autre danseur, Patric Kuo, la chorégraphie du clip de Jessie Ware ‘Hot N Heavy’. C’était un sacré challenge, car on tournait en plan séquence, soit 4 minutes de choré super-cardio en une seule prise !”