Sans oublier les marques Balenciaga, Vetements, Y Project, Diesel, et toute personne gravitant dans la galaxie de Rick Owens, perfusées aux codes esthétiques qui ont “No fear of The Dark”, pour reprendre le titre de l’essai du sociologue allemand Hartmut Rosa, publié ce mois-ci aux éditions de La Découverte. Et il sait de quoi il parle, puisqu’il en est un fervent disciple. Heureuse coïncidence, la Philharmonie de Paris accueille actuellement l’exposition “Metal Diabolus in Musica”, tandis qu’Arte.tv fourmille de documentaires et de concerts consacrés au genre. De quoi prouver au commun des mortels que le metal ne se limite pas qu’à une prestation grandiloquente d’un sombre groupe norvégien sur la scène de l’Eurovision ou à des séquences filmées de festivaliers éméchés au Hellfest montrant leurs fesses à la caméra de l’émission Quotidien.
L’armée de l’ombre
L’exposition monstre qui se tient en ce moment et jusqu’au 29 septembre, à la Philharmonie de Paris offre un passage en revue complet et détaillé de tout ce qui façonne le metal : musique, vestiaire ultra codifié, productions visuelles et esthétiques, retombées dans la culture populaire, objets divers issus du merchandising. Riche et foisonnant, le metal a engrangé un univers fourmillant de sous-genres et sous-sous-genres, allant du grunge et hard rock jusqu’au nu metal, heavy metal, doom metal, glam metal, gothic metal, thrash metal, black metal, death metal… La liste est encore plus longue que les doléances des Français adressées au président Macron. À la différence que ceux-ci n’ont pas fini aux oubliettes, poussés sans relâche par des fandoms passionnés et dévoués. Quid du succès incontesté du Hellfest ? Chaque année, c’est en moyenne 240 000 personnes qui affluent pendant quatre jours à Clisson, devenu depuis la création dudit festival en 2006, le Paradis, on devrait-on dire, l’Enfer sur Terre, des metalheads et attisant la curiosité de plus en plus de non-initié·e·s. Les plus avertis auront aussi remarqué que les murs du métro, parisiens en l’occurrence, ne désemplissent jamais d’affiches promotionnelles pour des concerts de metal – Deep Purple, Dream Theater, Megadeth qui rebranchent régulièrement les guitares en live, remplissant encore des Zéniths et autre adidas Arena, défiant ainsi toute logique marketing. Car comme le souligne Hartmut Rosa dans son essai : “De l’Indonésie au Brésil en passant par la Scandinavie, le Japon ou la Mongolie, le metal est l’une des musiques les plus populaires au monde bien qu’elle soit diffusée, jouée et écoutée en dehors des réseaux médiatiques dominants.” En attestent les photos de Frank Marshall et Paul Shiakallis prises entre 2014 et 2017 consacrées à la scène metal au Botswana, que l’on peut apercevoir dans le cadre de l’expo Metal. Bien que principalement de manufacture occidentale, le metal s’adapte aux codes esthétiques propres à chaque sphère culturelle locale et comme l’explique Paul Shiakallis dans le cadre de l’exposition à la Philharmonie, “dans les sociétés plus conservatrices, en particulier celles guidées par des croyances religieuses, (…), le style de vie heavy metal symbolise la rébellion.”