M. La porte vers Hollywood est-elle ouverte ?
S. O. Ce sont des choses qui prennent du temps. Mais j’ai effectivement un agent là-bas maintenant. Donc j’ai des castings pour l’Angleterre, pour les États-Unis. C’est très intimidant de se dire qu’il y a des gens là-bas qui se disent : “Tiens, on va faire un zoom avec ce gars, il peut nous intéresser”. J’ai grandi dans les Yvelines. Ça en fait de la route…
M. En France, Une histoire d’amour et de désir t’a récemment fait gravir un nouvel échelon avec une nomination aux César. Quel est ton souvenir du tournage ? As-tu senti que le film allait être fort à ce moment-là ?
S. O. Je l’ai senti avant, dès le scénario. C’était d’une beauté comme je n’en avais encore jamais vu, jamais lu. Le perso était loin de moi. Leyla, la réalisatrice, m’avait vu dans Fiertés, et elle a senti que j’avais quelque chose. Ce n’était pas évident pour moi à ce moment-là, car je jouais alors dans Sex Ed, une composition très axée sur le charisme, la présence. Mais elle a vu cette timidité, cette fragilité propre au personnage d’Ahmed. Alterner les deux a été une expérience très intéressante à l’époque.
M. Est-ce que le climat d’effondrement dans lequel le cinéma est actuellement plongé t’inquiète, te perturbe ?
S. O. Ça a été difficile de voir que les théâtres et les cinémas ne rouvraient pas, contrairement aux centres commerciaux ou aux bars… Et c’est dur aujourd’hui de voir que ça peine à redémarrer. Le problème, c’est qu’on s’est habitués pendant des mois à regarder des films sur nos petits écrans. Or je crois qu’il n’y a rien qui puisse remplacer l’expérience de la salle, et que c’est la meilleure manière de découvrir les films qui sont pensés pour être visionnés sur grand écran. Le montage, le mixage, l’étalonnage, tous les corps de métier, tous ces savoir-faire sont pensés pour les salles de cinéma. Je n’ai jamais rencontré un chef-op qui éclaire une scène en pensant au rendu sur un iPad.
M. On te verra très bientôt, le 5 octobre très précisément, dans Novembre, une reconstitution de la traque des terroristes du 13-Novembre, réalisé par Cédric Jimenez. Est-ce un film important pour toi ?
S. O. Bien sûr. J’espère vraiment qu’il va attirer le public. À Cannes, l’accueil a été très bon. J’ai vécu des choses fortes sur le tournage, notamment dans une séquence de recueil de témoignages au chevet des victimes hospitalisées, qui a été reconstituée à partir de témoignages bien réels. C’est quelque chose de très fort à vivre, parce que les traumatismes sont immenses, bouleversants, et en même temps la pudeur du film c’est de ne pas laisser l’émotion des policiers affleurer d’une manière qui prenne le pas sur leur travail ou sur les victimes. Donc, il faut se tenir. C’est la responsabilité du film de préserver cette dignité et je la sentais peser sur moi. Ça a été très fort.
M. As-tu des objectifs, des rêves que tu aimerais accomplir via le cinéma ?
S. O. J’aimerais un jour me confronter à la question de mes origines. Ma famille vient du Maroc et de la Guadeloupe. J’ai l’impression que cette histoire commune se perd dès lors qu’on veut parler de choses antérieures aux années 1970. C’est comme si ça n’avait pas existé… J’aimerais que ces histoires soient racontées
Novembre de Cédric Jimenez, en salles le 5 octobre.