Vinii Revlon. Crédit : Xavier Heraud

Les 1er, 6 et 8 août, The Legendary Vinii Revlon, Father de la House of Revlon, chorégraphe et artiste associé de la Gaîté Lyrique, organise le Paris Sports Ball, un événement inédit célébrant la culture Ballroom au Parc des Champions avec les danseur·se·s de la House of Revlon. Interview.

Les JO, c’est pas que du sport. C’est aussi de la performance au sens large du terme. Et cette année pour la première fois de l’histoire des JO ever, la communauté Ballroom sera présente en organisant plusieurs balls. Cet événement porté par l’Olympiade Culturelle de Paris 2024 et qui s’inscrit dans la programmation art vivant du Parc des Champions (site dédié à la célébration des athlètes médaillés) sera l’occasion de célébrer les corps et les diversités mais surtout les liens entre communautés queer et sportive.

On répète pour les deux du fond : la culture Ballroom trouve ses racines dans les communautés LGBT+ latina et afro-américaine du New York des 70’s et se veut être une scène artistique et politique mêlant compétitions de danse (voguing, old way…), drag ou encore runway au travers de différentes catégories et battles. Pour en savoir plus et vous enrichir, on vous recommande vivement de (re)lire notre super sujet consacré à des figures émergentes de la scène ballroom française écrit par le génial Paul-Arthur Jean-Marie dans notre numéro Empowerment spring-summer 2022. Représentant l’émergence du mouvement en France et dans le monde, c’est le Legendary Vinii Revlon, Father de la house of Revlon (dont fait partie notre go sure Keiona), qui a été choisi pour porter et animer ce projet. L’occasion de lui poser quelques questions à quelques jours du début des festivités.

 

Mixte. Comment t’es-tu retrouvé sur le projet des JO de Paris 2024 ?
Vinii Revlon.
Les membres du comité sont venus me chercher directement car il voulait vraiment inclure du voguing au JO. D’une manière générale, ça leur tenait à cœur de faire un vrai moment de célébration, c’est-à-dire d’avoir plusieurs événements et tableaux liés à la danse et à la performance, et selon elles·eux le voguing et la culture Ballroom devaient avoir leur place dans ce projet. Il·elle·s sont même venu·e·s à des balls avant pour voir l’énergie, la temporalité etc. Je crois que c’était aussi une forte volonté de leur part de faire bouger les choses et d’apporter un peu plus d’inclusion.

M. Oui, c’est bien la toute première fois qu’on va voir des balls organisés dans le cadre des JO, non ?
V.R.
Absolument !

M. Du coup, quel message veux-tu transmettre à travers cet événement inédit ?
V.R.
Mon but est de toujours créer des espaces safe pour les membres de ma communauté. Et cette communauté se retrouve aussi dans le sport. Encore aujourd’hui, être athlète de haut niveau, LGBT, et faire son coming out est quelque chose d’encore assez mal vu et mal accepté. C’était donc important de montrer que la communauté queer peut avoir sa place dans le sport et en être fière.

Vinii Revlon. Crédit Jean Ranobrac

M. Comment ça va se traduire concrètement ?
V.R. Chaque participant·e aux balls et qui walkera une catégorie aura une tenue inspirée du style et de l’esthétique des athlètes de diverses disciplines sportives comme le tennis, le basket, le tir à l’arc, le football etc. Mais façon remixé à la sauce ballroom, obviously. C’est-à-dire avec des paillettes, des strass, du glam. En vrai, ce qu’on veut dire c’est : “You can be a mother fucking athlete and still be queer, and that’s ok. Be yourself and have fun !”. C’est ça le message. On est ensemble et on est là pour (se) célébrer ensemble, au sens large du terme.

M. Qui va participer aux balls ?
V.R.
Pour la catégorie performance (danse voguing, ndlr), ce seront des membres de la House of Revlon. Et pour la catégorie Runway, des membres de la House of Revlon et de la House of Gucci.

M. Quel a été ton plus gros challenge sur ce projet ?
V.R.
Je dirais que je n’ai pas eu de gros challenge à proprement parler jusque-là. On taffe sur ce projet depuis le mois d’octobre dernier. Donc pendant neuf mois, on a fait beaucoup de réunions, de répétitions, d’essayages de looks… À l’heure où je te parle, on est encore en plein filage. Mais si je dois retenir un moment où j’ai été un peu impressionné, c’est quand, lors des conférences de presse officielles, j’ai dû prendre la parole — même si j’y suis habitué en tant que MC par exemple — car ici le set up et l’enjeu étaient différents. Quand je regardais autour de moi, il y avait plein d’officiel·le·s et de représentant·e·s politiques. Ça m’a mis un petit coup de stress. Mais je me suis vite recentré et j’ai fait ce que je sais faire de mieux : parler, ambiancer, rigoler et mettre à l’aise avec le sourire et la bonne humeur. Pour moi, le vrai challenge en fait, c’était de savoir si je devais m’adapter à l’endroit où rester 100% moi-même. Et ça a vite été réfléchi.

M. Est-ce que tu vois cette collaboration comme une forme d’accomplissement personnel, professionnel mais aussi culturel au sens large pour la communauté queer et la scène Ballroom ?
V.R.
Comme j’ai tendance à le dire, même si c’est moi qui serai au micro, it’s bigger than me. It’s for the community. En effet, je pense que c’est un pas et un point de plus pour la communauté parce qu’on devient visible·s à l’échelle mondiale mais aussi parce qu’on est officiellement invité·e·s. Pour le coup, on ne sera pas considéré·e·s comme des outcasts, même si je me doute que ça va en déplaire à certain·e·s. Mais en vrai, ça, on s’en tape. La vérité, c’est que le monde a évolué et qu’il est temps que les jeux olympiques reflètent véritablement le monde dans lequel on vit. J’ose espérer que ça ne soit pas qu’un one shot, et qu’on retrouve du voguing et des moments de célébrations comme celui-ci dans les prochaines éditions des JO.

M. Justement, cette année les JO ont accueilli le break dance comme nouvelle discipline. À quand le voguing selon toi ?
V.R.
(il prend le temps de réfléchir) Euh… I don’t know ! Je reste quand même dubitatif (rires). Le voguing a des règles très précises. Avec ce projet, il s’agit juste de donner un glimpse de ce qu’est la Ballroom. On donne juste ce qu’il faut mais pas trop. C’est comme un “amuse-gueule” pour que les gens s’y intéressent et qu’ils viennent ensuite voir nos balls et nous soutenir.

PARIS SPORTS BALL, 1er, 6 et 8 août 2024 de 17h30 à 17h45, Parc des Champions, Place du Trocadéro et du 11 Novembre, 75116 Paris, France. Gratuit, en accès libre dans la limite des places disponibles