“Pour survivre, il faut s’ingénier à chercher des fissures dans l’infortune, pour parvenir à s’évader quelque peu” / “In order to survive, one must strive to find cracks in misfortune, so as to escape a little”

Si la mode était accusée de tentative d’évasion, elle plaiderait certainement coupable. Il suffit pour le comprendre de s’attarder sur les pièces à conviction de ce procès vestimentaire : les défilés printemps-été 2024. Que ce soit Courrèges et son catwalk ressemblant à un sol lunaire crayeux et craquelé, Rick Owens et son final agrémenté de fumigènes et de pétales de roses balancés dans l’air, Mugler et ses mannequins badass métamorphosées en glamazones aquatiques, Balmain et ses silhouettes florales sculpturales, Louis Vuitton et son décor en montgolfière orange démesurée ou encore Givenchy et ses mannequins à la démarche lente et éthérée dans un set design en toile blanche immaculée rappelant la forme et la légèreté d’un nuage, les marques nous ont ouvert les portes de leurs propres mondes chimériques. Entre douceur, poésie et onirisme, elles nous ont ainsi fait part de ce désir et de ce besoin brûlant d’évasion qui squatte aujourd’hui tous les esprits du fashion game, et au-delà. Comme le disait l’écrivain chinois Lao She : “Pour survivre, il faut s’ingénier à chercher des fissures dans l’infortune, pour parvenir à s’évader quelque peu”. En somme, c’est comme si nous cherchions une échappatoire radieuse à notre monde actuel où tout semble partir à yolo. Cette aspiration singulière qui caractérise notre époque et a été choisie comme thème de ce numéro porte un nom précis : ESCAPISM. Soit la tendance philosophique et sociologique à “chercher la distraction et l’éloignement d’une réalité désagréable, notamment par le divertissement, l’imagination et la fantaisie”. Espérons alors que ce nouveau numéro sera pour vous l’occasion d’entrer dans les mondes imaginaires de nos différents talents et collaborateur·rice·s, que ce soit à travers les séries mode fantasques des photographes Lola Banet, Matthieu Delbreuve, Léa Wormsbach, Carlos Idun-Tawiah ainsi que Warren Du Preez et Nick Thornton Jones, les portfolios des artistes contemporains Josèfa Ntjam et Omar Victor Diop, nos décryptages mode sur l’avènement du luxe spatial et l’obsession vestimentaire autour des contes de fées, les interviews des actrices Lyna Khoudri et Manon Bresch, ou les rencontres avec des figures emblématiques de la pop culture comme Ysaora Thibus (championne du monde d’escrime), Keiona (grande gagnante de la dernière saison de Drag Race France) et le groupe Bagarre, de retour avec un troisième album après cinq ans d’absence. Sans oublier la prise de parole des designers qui font le futur de la mode, à l’image de Peter Do, Zomer, Torishéju, D’heygere, Meryll Rogge, Asquin et Ouest Paris. De quoi commencer à planifier votre prochaine grande évasion.

Antoine Leclerc-Mougne, Rédacteur en chef.

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​​If fashion was to stand trial for attempted escape, it would probably have to take a guilty plea. To fully grasp what we’re talking about, simply linger over the exhibits in this wardrobe trial, namely the spring-summer 2024 shows: whether it’s Courrèges and its catwalk looking like a chalky, cracked moon floor, Rick Owens and his finale featuring smoke bombs and rose petals tossed in the air, Mugler and his badass models turned aquatic glamazons, Balmain and his sculptural floral silhouettes, Louis Vuitton’s over-the-top orange hot-air balloon decor, or Givenchy’s models with their slow, ethereal gait in this immaculate white canvas design set reminiscent of the shape and lightness of a cloud, brands have opened the doors to their own chimerical worlds. Between softness, poetry and imagination, they shared with us their desire and burning appetite for escapism, something that’s on everyone’s mind these days in the fashion game, and beyond. As Chinese writer Lau Shaw said, « in order to survive, one must strive to find cracks in misfortune, so as to escape a little”. In short, it seems we’re looking for a radiant escape from our current world, where everything seems to be going to hell in a handbasket. Which is why we picked this distinctive aspiration typical of our times as the theme for this issue. Namely, ESCAPISM, or the philosophical and sociological tendency to « seek distraction and relief from unpleasant realities, especially by seeking entertainment, or engaging in fantasy”. We’re hoping our latest issue will be an opportunity for you to uncover the imaginary worlds of our various talents and contributors, whether through the whimsical fashion series by photographers Lola Banet, Matthieu Delbreuve, Léa Wormsbach, Carlos Idun-Tawiah as well as Warren Du Preez and Nick Thornton Jones, the portfolios by contemporary artists Josèfa Ntjam and Omar Victor Diop, our fashion analysis on the advent of space luxury and the sartorial obsession with fairy tales, interviews with actresses Lyna Khoudri and Manon Bresch, and encounters with iconic pop culture figures such as Ysaora Thibus (world fencing champion), Keiona (winner of last season’s Drag Race France) and the band Bagarre, back with a third album after a five-year hiatus. not forgetting the designers shaping the future of fashion, such as Peter Do, Zomer, Torishéju, D’heygere, Meryll Rogge, Asquin and Ouest Paris. Just what you need to start planning your next great escape.

Antoine Leclerc-Mougne, Editor-in-chief.

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Mixte #33 Spring-Summer 2024 – ESCAPISM ISSUE – out friday March 1st. Order your copy here !